Page 5 - CKG FINEART - Gilles Gorriti
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La peinture accompagne Gilles Gorriti depuis l’enfance. Le passage fut-il aisé entre l’atelier du père, Paul    ௥ౣలʹدͤͯ
                  Aizpiri, et le sien ? Une vocation irrévocable donne la réponse alors qu’avec les années il conquiert et affermit
                  son univers plastique et crée sa propre vision de la peinture.
                       Peintre de la réalité, il en cherche la beauté secrète et installe très vite un dialogue entre les objets et
                  lui-même, transpose le visible dans un jeu plastique et coloré. C’est donc au-delà du réalisme qu’il entend rester   ༮গظΑΓδϧɾΰϦν͸ֆըͱڞʹҭͬͨɻըՈͰ͋Δ෕ɺ                     ൴ͷ৭࠼ͷ๛͔͞ɺ੺ɾ੨ɾɾɾͦΕΒݪ৭ͱʢ൴͕ܟѪ͢Δ
                  fidèle à une tradition picturale attentive aux accords harmonieux des couleurs et des rythmes. La leçon des Nabis    ϙʔϧΞΠζϐϦͷΞτϦΤͱ൴ͷΞτϦΤͱͷߦ͖དྷ͸༰қ                     ΰϠ΍Ϛω͕޷ΜͩΑ͏ʹʣࠇͷଟ༷ੑΛ࠷େݶʹར༻͠ɺ
                  a  été  entendue  tout  comme  celle  de  Matisse  et  de  Picasso,  dont  il  admire  les  papiers  collés.  Il  construit  ses   ͳ͜ͱͩͬͨͷͩΖ͏͔ʁ                       ิ৭ʹΑͬͯ΍ΘΒ͛ΒΕͨ৭ௐɺͦΕ͸·ΔͰԻָΛฤۂ͢
                  compositions à la façon d’un haïku, image après image, aussi différente que complémentaire en piégeant le sens       ఆΊΒΕͨಓͰ͋ΔͱΘ͔͔ͬͯΒɺ೥ͱڞʹɺ൴͸ࣗΒͷ଄                     Δ͔ͷΑ͏ͩɻ൴͸ੜ·ΕނڷͷόεΫͰग़ձͬͨϑϥϝϯί
                  au  profit  d’un  sentiment  de  surprise.  Il  construit  et  déconstruit  sa  composition,  réinvente  la  perspective  en   ܗੈքΛ֫ಘ͠ɺಠࣗʹֆըͷࢹ఺Λ૑Γ্͛ͨɻ                ૗ऀΛසൟʹ๚ͶɺڞʹΪλʔΛ૗Ͱ͍ͯͨɻ൴ͷ͜ͷख़࿅
                  ouvrant de nouveaux espaces pour un monde poétique.
                       Gorriti peint ce qu’il aime. Les objets chinés dans les brocantes ou rapportés de ses voyages, son atelier                                                       ͨ͠ϛϡʔδγϟϯͱͯ͠ͷҰ໘Λ஌Ε͹ɺͦΕ΋ڻ͘͜ͱͰ͸
                  encombré de ses modèles familiers – pot et pinceaux, pichet, vases de fleurs, étoffes, fruits dans une coupe. Ses    ࣮ࣸओٛͷըՈͰ͋Δ൴͸ӅΕͨඒΛ୳͠ग़͠ɺͦͷର৅෺                      ͳ͍ͩΖ͏ɻ
                  natures silencieuses, ses scènes d’intérieurs, sont en prise directe sur l’imaginaire pour une évasion naturelle     ͱͷձ࿩Λ࢝ΊΔɻͦͯ͠໨ʹݟ͑Δ෺ମΛ৭࠼ʹ෋Μͩ଄ܗ
                  hors du monde et d’une réalité ordinaire. Une toile posée sur le chevalet devient la métaphore du miroir. Celui      ʹஔ͖׵͑Δɻͭ·Γ൴͸࣮ࣸΛ௒͑ͯ৭࠼ͱϦζϜͱͷௐ࿨                     ҰͭͷΠϝʔδ͔Βଈ࠲ʹ׭ೳతͳͻͱච͕Ωϟϯόεʹඳ
                  de la peinture comme reflet de ce que nous croyons voir selon un illusionnisme auquel le peintre se refuse de        ΛऔΔ͜ͱͰ఻౷తͳֆըٕ๏ʹ஧࣮Ͱ͋Ζ͏ͱͨ͠ɻ                        ͔ΕΔͱओ୊͸໌շͱͳΔɻͻͱචͻͱචॏͶΒΕɺ೾ঢ়ͷɺ
                  recourir par le trompe-l’œil. Il s’appuie sur le jeu simultané d’images vraies qu’il redistribue sur la surface selon
                  un processus de découpage par fragments, selon la vision de son atelier. Un atelier qui se façonne à son image,      ൴͸φϏ೿ͷڭٛʹֶͼɺ·ͨϚςΟε΍ϐΧιͷίϥʔδϡ                     ͍҃͸్੾Ε్੾ΕͷઢʹΑͬͯෳ਺ͷখ͞ͳߏਤ͕ੜΈ
                  à laquelle répond sa peinture. L’atelier se remplit au gré des accumulations d’objets, se déplace, se recompose      Λশࢍͨ͠ɻ                                           ग़͞ΕΔɻ͜Ε͸൴͕೔ຊͷ൛ըΛ޷ΜͰ͍ͨ͜ͱ͔Β΋͏ͳ
                  suivant les lieux aimés : celui de Paris, de Montfort, de Beauvallon, de Guétary. L’atelier est le lieu clos où      ൴͸ҟͳΔ͕͓ޓ͍ʹิ͍߹͏ΠϝʔδΛͭ͗ͭ͗ͱ૊Έ߹                      ͚ͣΔɻ൴͕ओ୊͔ΒͱΔڑ཭͸ɺΩϟϯόεͷ࿮Λ௒͑ֆը
                  l’intimité va de pair avec l’effusion colorée et la douce chaleur nostalgique qui s’en dégagent.                     Θͤɺആ۟Λ૑࡞͢ΔΑ͏ʹߏਤΛ૑Γ্͛ΔɻͦͷΠϝʔδ                     ͷ޿͕ΓΛੜΉɻ͞ΒʹզʑʹΨετϯɾόγϡϥʔϧͷݴ͏ɺ
                       Sa peinture est une digression visuelle, illusoire et enchanteresse. Formes et couleurs suggèrent des sons,     ͸·ΔͰಾ͔͚ͷΑ͏ʹݟΔଆʹڻ͖Λ༩͑Δɻ൴͸ࣗ෼ͷ                      ເ૝ͷࢻֶΛ૝ىͤ͞ɺզʑ͕໨Ͱଊ͑Δ΋ͷΛ௒͑ͨ૝૾
                  aussi éphémères que l’est le réel, insaisissable, dispensateur d’un sentiment tout aussi fugitif. S’emparer par le
                  dessin et la couleur de l’instant passager saisi par le regard revient à le suspendre dans  l’espace imposé de la    ૑࡞ͨ͠ߏਤΛ෼ղ͠࠶ߏங͢Δ͜ͱͰ৽ͨͳࢻతੈքΛ                       ͷੈք΁ͱಋ͘ɻ
                  toile. Telle est la quête de la peinture de Gorriti.                                                                 ߏங͢Δɻ                                            ͦͯͦ͠ͷֆ͸ເͷ༷ͳҟۭؒͱͳΔɻ൴ͷΏͬ͘Γͱͦͯ͠
                      La richesse de sa palette dominée par les rouges, les bleus, les dominantes primaires rompues par les couleurs                                                    ߇͑Ίͳֆը΁ͷΞϓϩʔνɻΰϦν͸ޫ͕৭࠼Λࡍཱͨͤ
                  secondaires adoucies des demi tons saturés par le noir (si cher à Goya et à Manet, des modèles pour lui) orches-     ΰϦν͸͓ؾʹೖΓͷ΋ͷΛඳ͘ɻྫ͑͹ϒϩίϯτͰ୳͠ग़                     Δ࠷༏ઌͷཁૉͰ͋ΔࣄΛ஌͍ͬͯͨɻ
                  tre des correspondances intimes et musicales. Nulle surprise chez ce musicien accompli qui pratique la guitare,      ͨ͠΋ͷɺ͍҃͸ཱྀઌͰݟ͚ͭͨ΋ͷɾɾɾචཱͯͱֆචɺਫࠩ                    ฏୱʹ৭͚ͮ͞ΕͨΦϒδΣ͸ɺྠֲΛڧௐ͢ΔΑ͏ʹ೑෇
                  et fréquente les joueurs de flamenco qu’il retrouve au Pays Basque natal.
                       A partir de l’inscription d’une image, de celle d’une couleur posée d’une touche immédiate et sensuelle, le     ͠ɺ͞·͟·ͷ৫෺ɺՖළɺ෍ɺՌ෺͕੝ΒΕͨࡼɻ                         ͚͞ΕΔɻ͋͑ͯຊ౰ͷྠֲͱͣΒͯ͠ԑऔΔࣄʹΑͬͯͦͷ
                  sujet  impose  sa  lisibilité  à  partir  des  petites  compositions  imbriquées  les  unes  aux  autres,  soudainement   ൴͕׳Ε਌͠Μͩ඼ʑ͕ҲΕͨΞτϦΤɻͦΕΒͷ෺ݴΘ͵                 ৭࠼͸༂ಈײΛ΋ͬͯಈ͖ग़͢ɻ
                  interrompues par la découpe d’une ligne sinueuse ou brisée pour un cadrage inattendu, un clin d’œil à sa fascina-    ෺͕ͨͪฒͿࣨ಺෩ܠ͕ͦ͜ɺ൴ͷ૝૾Λ͔͖ͨͯɺฏຌͳ
                  tion  pour  l’estampe  japonaise.  Le  recul  qu’il  prend  avec  son  sujet  introduit  un  mouvement  qui  se  prolonge   ݱ࣮ੈք͔ΒͷಀආΛՄೳʹ͢ΔɻΠʔθϧʹஔ͔ΕͨΩϟ               ֆըͷ๯ݥͱ͸ઈ͑ؒͳ͍ม༰Ͱ͸ͳ͍ͩΖ͏͔ʁ
                  au-delà du cadre et entraîne notre imaginaire amenée à prolonger la peinture au-delà de ce que notre œil perçoit     ϯόε͸ڸͱͳΔɻ൴͸ɺզʑʹݟͨͱ৴͜͡·ͤΔͩ·͠ֆͷ                    σοαϯʹΑͬͯ໌֬ͰཚΕͷͳ͍ਤ૾Λߏங͠ɺҰํͰ
                  pour une poétique de la rêverie selon le philosophe Gaston Bachelard.
                      La peinture devient alors le lieu de digressions rêveuses. Dans sa lente et pudique démarche picturale, Gorreti   ٕ๏ʹཔΔ͜ͱΛΑ͠ͱ͠ͳ͍ɻࣗ਎ͷΞτϦΤʹ͋ΔޫܠΛஅ                   ֆ۩͸ີ౓ͷ͋Δ׭ೳతͳܗΛ۩ݱԽ͠ɺ࣮ʹಠಛͳ৭ௐ
                  sait que la lumière est un élément prioritaire pour exalter la couleur. Posée en aplats repris et modulés exaltant   ยతʹ੾ΓऔΓɺͦΕΛ࠶෼഑͢Δ͜ͱͰΠϝʔδΛߏங͢Δɻ                    Λৢ͠ग़͢ɻ
                  les contours des objets, faussement cloisonnés pour un parti pris de décalage, la couleur intervient comme un        ൴ͷඳ͘ֆը͸ֆͷܗΛͨ͠ͻͱͭͷ൴ͷΞτϦΤɻ
                  élément mouvant.                                                                                                     ΋ͷʹҲΕͨ࠷Ѫͷ৔ॴ ʕύϦͷΞτϦΤɺ͍҃͸ϞϯϑΥ                     δϧɾΰϦνͷ͜ͱ͹ʢ࡞඼ʣ͸ɺզʑʹͻͱཱ࣌ͪࢭΓɺᛉ૝
                      L’aventure de la peinture n’est-elle pas en constante métamorphose ?                                             ʔϧɺϘʔϰΝϩϯɺήολϦʔͷΞτϦΤɻ൴ͷΠϝʔδ͸͜                    ͢Δ͔ͷΑ͏ʹݟΔࣄ΁ͱ༠͏ɻ
                      Tandis que le dessin écrit, le geste précis et juste construit l’objet, la matière incarne une forme, dense et
                  charnelle, pour une harmonie des lignes accordées à un chromatisme aux résonances picturales très personnelles.      ΕΒͷ৔ॴΛҠಈ͠ɺ࠶ߏ੒͞ΕΔɻ                                զʑ͕஌͍ͬͯΔͱࢥ͍ࠐΜͰ͍Δ͕ɺ࣮͸೔ৗੜ׆ͱ͸ผͷ
                      Le langage de Gilles Gorriti nous invite à nous arrêter et à regarder, pour une méditation accordée au temps     ΞτϦΤ͸൴ʹͱͬͯͦͷۭ͕ؒ࣋ͭԺ΍͔ͳϊελϧδʔͱ                     டং͕͋ΔࣄΛͦ͜ʹݟग़͢ͷͰ͸ͳ͍ͩΖ͏͔ʁ
                  suspendu. Que voyons nous que nous pensions connaître et qui est d’un autre ordre que celui du quotidien ? Le        ৭࠼ͷൃ࿐Ͱ͋Δͱڞʹɺ৺ͷԞఈʹ͋Δ΋ͷΛදݱ͢Δ͜ͱ                     ֆըͷੈք͸๨ΕΒΕͨ࣌ؒͷ୳ٻ΁ͷҰͭͷ౴͔͑ͩΒɻ
                  monde de la peinture est une réponse à la recherche du temps oublié.                                                 ͕ग़དྷΔਆ੟ͳ৔ॴɻ
                                                                                                                                       ൴ͷֆը͸զʑͷࢹ͔֮Βҳ୤͠ɺݬ૝తͰັྗతͩɻ                                                                  ɹ
                                                                                                                                       ܗ΍৭͸ଊ͑Ͳ͜Ζ͕ͳ͘ɺͱͯ΋͸͔ͳ͍ɻݟͨ΋ͷΛॠؒ                                                 ϦσΟΞɾϋϥϯϒϧά
                  ɹɹɹɹɹɹɹɹɹɹɹ                                 Lydia Harambourg
                  ɹɹɹɹɹɹɹɹɹɹɹ                             Historienne Critique d’art                                                   తʹଊ͑ɺܗͱ৭ΛΩϟϯόεͱ͍͏ݶΒΕۭͨؒʹදݱ͢Δɻ                                           ඒज़ධ࿦Ոɹඒज़࢙ධ࿦Ո
                  ɹɹɹɹɹɹɹɹɹɹɹ        Membre correspondant de l’Académie des Beaux-Arts                                                 ͦΕ͕ͦ͜ΰϦνͷֆըͷ୳ٻͰ͋Δɻ                                                 ϑϥϯεɺΞΧσϛʔɾϘβʔϧձһ
                   ɹɹɹɹɹɹɹɹɹɹɹ                               Institut de France                                                                                                                                                ೥ ݄

                  Juin 2019
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